Les tableaux de Charlotte Kollmorgen sont-ils beaux ?

On peut toujours se quereller sur savoir ce qui est beau et ce qui ne l’est pas. Le terme de beauté a constamment évolué au cours de l’histoire. Pourtant, il est possible de démontrer que, dans toutes ses œuvres, l’artiste ne veut attaquer, blesser, critiquer, tromper, ni déconcerter personne, qu’elle ne veut pas non plus faire passer une idéologie, ni donner d’instructions. Elle ne se met pas non plus au service de la cause d’un je-ne-sais-qui, qui pourrait lui appliquer des normes ou lui imposer des règles. Dans ses œuvres, on est plutôt confronté à une artiste indépendante, qui assume ses propres responsabilités et qui définit elle-même ses propres normes artistiques. Sur ce point, Charlotte Kollmorgen est une artiste du courant moderne et ses œuvres sont, de par leur indépendance dans le choix des contenus et des moyens utilisés, une expression de la démocratie. L’autonomie de l’artiste s’exprime également par le fait qu’elle ne pense pas - selon ses dires - à ses admirateurs ou acheteurs potentiels au moment de créer ses toiles. En revanche, elle suit son impétuosité artistique, ainsi que sa conception esthétique, sensible, mais également tout à fait rationnelle de l’organisation. En effet, toutes ses peintures ont une organisation délibérée, nombre d’entre elles sont orientées vers un centre, elles sont ordonnées et représentent des ordres, qui sont perçus de façon plus agréable que provocante par ses contemporains.

Maintenant, celui qui a tendance à penser que cet art n’a aucune fonction, doit voir si, humainement, il n’a pas un sens, s’il ne peut pas satisfaire les attentes, susciter la découverte, déclencher des sentiments. L’artiste veut également mettre l’accent sur la cohabitation entre l’homme et la nature, sur la menace qui pèse dessus et sur la nécessité que les hommes réapprennent à réfléchir en osmose avec la nature. Cette position est également un des thèmes de sa production artistique.

Les influences d’autres artistes - Classification historique et artistique

Si l’on suppose que l’art provient essentiellement de l’étude de l’art, et qu’une artiste professionnelle possède, tout à fait naturellement, en elle un grand trésor d’expériences artistiques, il est concevable de se poser la question de savoir où les approximations peuvent se vérifier. Cette vision de l’art est celle d’une tentative de classification historique et artistique. Aucun artiste en activité n’a finalement commencé tel Adam ou Eve. Tous appartiennent à la tradition de l’art, même s’ils veulent délibérément s’en différencier ou présenter des contre-projets.

Certaines œuvres de Charlotte Kollmorgen m’ont agréablement remémoré mon ancienne visite de la galerie nationale du romantisme au château berlinois de Charlottenburg. Elles m’ont tout particulièrement rappelé la lumière et l’atmosphère qui se dégageaient des tableaux des peintres du romantisme, comme par exemple une vue à travers des falaises. Les dessins de cavernes, les porches, les formes végétales, les racines m’y ont également fait penser.

Mais ce n’est pas une raison suffisante pour dire d’elle que c’est une néo-romantique. Je parle plutôt d’associations qui peuvent frapper un observateur.

Il y a une autre association : c’est la figure du Mandala. Nous avons déjà mentionné ce voyage en Inde et les tableaux qui s’y réfèrent. Ce qui est frappant sur ses premières toiles de petit format, ce sont les formes circulaires placées en leur centre. La composition centrale, une illustration de l’art religieux, est ici utilisée pour une « confidence quasi intime » (Kandinsky, p. 202).

Le déchiffrage de la confidence est associé, chez Charlotte Kollmorgen, à un plaisir des yeux. Destiné à de nombreux admirateurs. C’est ce qu’il faut souhaiter.

Berlin, Decèmbre 2000

Johannes Eucker

Traduit par Eurotraduc d'après le texte allemand original.